Le Triangle Dramatique (Partie 3)

Article publié dans le numéro 18 du magazine Lavida

Bonjour Guillaume, dans le présent numéro, nous continuons notre échange sur le Triangle Dramatique. Dans l’avant dernier (n°16) vous nous l’avez présenté sur l’angle du développement psycho-affectif et cognitif. Dans le numéro précédent (n°17), vous l’avez resitué dans le cadre de l’Analyse Transactionnelle de Eric Berne en développant les concepts de : Signes de Reconnaissance SDR (+ /-, conditionnel/inconditionnel) et de structuration du temps dont vous nous avez décrit les six modes : le retrait, les rituels, les past-time, l’activité, l’intimité et les jeux psychologiques. Enfin, vous nous aviez précisé que les jeux psychologiques avaient tous comme base de fonctionnement le Triangle Dramatique. Vous les définissiez ainsi :

 

«  Les rackets et les jeux psychologiques ou stratagèmes au sens de jeu pervers ou jeu de dupes, n’ont rien d’amusant, bien au contraire. Ce sont des manipulations émotionnelles de soi-même ou d’autrui aboutissant systématiquement à des sentiments désagréables quoique rassurant par leur répétition. Ils peuvent être considérés comme des façons d’éviter les dangers apparents de l’intimité ou de la rencontre authentique, mais avec un haut niveau d’intensité dans l’échange. Ils obéissent donc à certains scénarios typiques qui ont leur origine dans les apprentissages inconscients de l’enfance, en particulier autour du complexe d’Œdipe. Ces scénarios ont tous comme base le Triangle Dramatique issu des dérives d’une triangulation Œdipienne saine (n°16). »

Un jeu psychologique est une suite de transactions où les protagonistes « s’installent » inconsciemment (parce qu’on n’y « joue » pas volontairement, même quand on pense manipuler consciemment…) dans les trois rôles que sont le Persécuteur, le Sauveur et la Victime.

 

 

 

Bonjour Christine. Oui, nous avions précisé également que l’échange est typiquement celui de transactions à double fond, c’est-à-dire des transactions dans lesquelles coexistent une transaction « de surface », visible, observable, audible, et une transaction « sous entendue », invisible, interprétable. On qualifie en général les premières de transactions au niveau social et les secondes de transactions au niveau psychologique. »

 

Quelle est la suite du programme ?

Je vous propose de continuer d’approfondir le terme et le concept de jeu psychologique. Nous parlerons également des positions de vie puis nous aborderons la description des rôles du Triangle de Karpmann : Victime, Persécuteur et Sauveur.

Allons donc plus loin dans la compréhension de ce terme de jeu psychologique. Pourquoi cette appellation ? Il scandalise souvent la première fois qu’il est entendu. Pourtant, simultanément, intuitivement, il sonne juste. Le mot choque pour plusieurs raisons. Les jeux psychologiques n’étant ni drôles, ni ludiques, le terme de jeu paraît d’abord inadéquat. Ensuite, ces échanges infructueux et négatifs semblent involontaires et leurs enjeux sont souvent inconscients. Comment imaginer qu’on puisse faire exprès de se disputer ? Mais le mot sonne juste parallèlement parce que l’exagération, la dramatisation théâtrale, l’insincérité latente sont perceptibles. De même, ces situations négatives sont étrangement standard et semblent obéir à des règles quasiment immuables. Certaines disputes familiales, par exemple, sont répétitives au point qu’on pourrait mettre en route l’enregistrement des répliques d’une dispute antérieure pour continuer les échanges verbaux rituels jusqu’à l’ultime claquement de porte ou à la crise de larmes finales.

 

Prenons l’exemple d’un ado affalé sur le canapé devant la télé. Un de ses parents entre dans la pièce, demande sur un ton inquisiteur et soupçonneux: « Tu as déjà fini tes devoirs ? » L’adolescent qui perçoit l’accusation sous-jacente se justifie avec agacement : « Ouais, c’est bon, j’ai bossé tout l’après-midi ! Je peux me détendre un peu. » Le parent enchaîne, sarcastique : « Ça pour te détendre, tu sais le faire ! Mais pour amener des bonnes notes en maths… » L’ado riposte sur un ton agressif : « C’est ça, je suis nul, je vais rater mon bac, je suis un bon à rien, je connais la chanson. » Il part en claquant la porte. Le parent pousse un soupir exaspéré, attrape la télécommande et change de chaîne.

Oui, en effet, c’est un genre de scène assez classique.

Il y a la version brève, comme celle que nous venons d’évoquer, mais malheureusement aussi les versions plus longues, plus intenses, plus violentes… Dans cet exemple les enjeux sont de deux natures :

  • Un jeu de pouvoir autour de la télécommande : le parent a récupéré sa télévision sans même avoir eu à demander la place ni à donner un ordre à son enfant.
  • La culpabilisation de l’autre. Le parent cherche à culpabiliser son adolescent dans l’espoir de le faire travailler. L’ado cherche à culpabiliser son parent pour le mettre en échec dans sa fonction parentale.

Un coup d’envoi, des enjeux, des règles codifiées… tout y est pour parler de jeu. C’est pourquoi après quelques explications, le terme de jeu est généralement accepté voire adopté. « Oui, c’est exactement ça que je ressentais ! » Ainsi, à chaque fois que vous vivez une relation négative, décourageante et frustrante, il y a fort à parier que vous vous êtes fait entraîner dans un jeu de triangle, que vous l’ayez initié ou que vous vous y êtes laissé prendre. Voici des signes qui peuvent signaler l’existence d’un jeu psychologique :

  • Vous avez obtenu le contraire de ce que vous vouliez
  • Vous avez la sensation d’avoir gaspillé votre énergie dans des échanges infructueux et irritants.
  • Vous concluez une séquence relationnelle avec l’impression de vous être fait avoir.
  • C’est toujours le même sujet qui revient sur le tapis, sans pour autant qu’il soit résolu à la fin de l’interaction.

Nous sommes tous régulièrement piégés dans ce genre d’échanges négatifs. Et nous sommes tous d’accord pour dire que ce n’est pas drôle. Cela nous fait perdre beaucoup de temps, gaspiller une énergie folle et surtout, nous donne une impression d’enfermement.

Les solutions existent. Pour en sortir (ou en tout cas y tomber moins souvent), il convient notamment

  • De comprendre précisément les mécanismes, les rôles, les règles et les enjeux (le Savoir)
  • D’acquérir les moyens mentaux et émotionnels de désamorcer les jeux en développant nos capacités à communiquer à l’aide de techniques adaptées (PNL, Analyse Transactionnelle, Communication Non violente, différentes techniques d’assertivité, travail sur la confiance en soi, l’estime de soi…) (le Savoir-Etre et le Savoir-Faire).

Concernant le premier point, pour comprendre les mécanismes des jeux, revenons à la définition qu’en fait Eric Berne. Il définit le jeu comme « un ensemble de transactions double, périodique, récurrent, plausible en apparence, avec une motivation cachée », plus familièrement comme « une série de coups avec un piège ou un truc ». La fin du jeu intervient au moment d’un dénouement incontestable, équivalent à un but ou à « échec et mat ». Il est possible de différencier facilement un jeu d’une relation normale. Par exemple, je peux avoir besoin de réconfort, le demander l’obtenir. C’est une séquence relationnelle saine et normale. Dans le jeu, la transaction est piégée. Mon besoin de réconfort sera feint ou bien ma demande sera indirecte et manipulatrice, ou encore le réconfort offert sera rejeté.

Pourquoi cette femme ne dit t’elle pas à son mari en rentrant à la maison : « S’il te plaît, j’ai eu une dure journée. J’aurais besoin de me blottir un moment dans tes bras. Veux-tu bien laisser ton ordinateur pendant un quart d’heure ? » Souvent, c’est la peur du refus de l’autre qui empêche de formuler des demandes simples et claires. C’est peut-être la même peur d’être critiqué ou rejeté qui a empêché son mari de venir la saluer chaleureusement à son arrivée. Mais dans la majorité des cas, c’est une peur plus profonde, celle de l’intimité des échanges affectifs qui fait préférer les jeux à des relations positives. Lorsqu’on perçoit la proximité avec l’autre comme potentiellement dangereuse, on peut combler son vide affectif avec les sensations négatives fortes que procurent les jeux. Et Éric Berne va jusqu’à postuler que le masochisme est un « faute de mieux » que les gens mettent en place à la suite d’une grande privation affective et sensorielle.

Parallèlement, dans le meilleur des cas, le jeu permet d’atteindre maladroitement un objectif légitime. Son mari finira peut-être par la prendre dans ses bras, surtout si elle s’effondre en larmes. Mais la plupart du temps, il sert surtout à alimenter les passe-temps négatifs qui suivent le clash. Ils passeront sûrement un long moment à ruminer leurs disputes !

Il est à noter que les jeux psychologiques servent également à éviter soigneusement toute solution constructive aux problèmes qu’ils soulèvent. Cela se comprend lorsqu’on sait que les problèmes évoqués lors des jeux ont pour fonction d’alimenter nos besoins d’échanges (les fameux strokes ou SDR+/-(cf. Lavida n° 17)).

Les positions de vie :

C’est dans les fins de partie qu’intervient ce dernier enjeu également découvert par Eric Berne : les positions de vie. En fonction de ce qu’il a reçu comme attention positive ou négative, comme coups et câlins, critiques ou compliments dans son enfance, chacun se fait une idée très précise de sa valeur personnelle et de celle des autres. Ce sera sa « position de vie », une synthèse d’estime de soi et des autres qui répond à ces deux questions :

  • Suis-je quelqu’un de bien ?
  • Puis je faire confiance aux autres ?

 

  • Si la réponse est oui aux deux questions, la personne est dite OK+ /OK+. Elle fonctionne d’égal à égal, dans un esprit de collaboration constructive, en étant sincère et authentique.
  • Si la réponse est non aux deux questions, la personne est OK-/OK-. Elle aura probablement des comportements très destructeurs et autodestructeurs.
  • Entre ces deux extrêmes, vous trouverez des gens à l’estime d’eux plus ou moins haute et à l’esprit de collaboration plus ou moins développés. Ils seront OK+/OK-, c’est-à-dire portés à mépriser les autres et à se croire supérieurs. Ou OK-/OK+, donc souvent complexés, admiratifs et envieux.

La clôture d’un jeu sert à confirmer cette position de vie.

Tout en reprenant à son compte une bonne partie du sens habituel du terme, le « jeu » psychologique n’implique donc pas l’idée de divertissement, ni d’ailleurs celle de calcul conscient.

En Analyse Transactionnelle, le terme de jeu est presque toujours connoté négativement. Pour autant, Éric Berne pratiquait la psychothérapie avec simplicité et tendresse, et ce sont ces patients eux-mêmes qui ont baptisé les jeux qu’ils découvraient lors des séances de thérapie de groupe. Cela explique pourquoi les noms donnés aux jeux sont très évocateurs et souvent humoristiques, dignes d’être des titres de pièces de théâtre: la jambe de bois, la scène, c’est affreux ! C’est toi qui m’as entraîné là-dedans ! Je m’en sors pas ! Battez-vous ou, cette fois je te tiens, mon salaud !…

Le jeu de la jambe de bois, par exemple, vient de l’expression « mettre un cautère sur une jambe de bois ». C’est l’équivalent de plaider l’irresponsabilité au tribunal. Le joueur de jambe de bois dira des phrases comme : « que voulez-vous qu’une tête de linotte comme moi comprenne de tout cela ! » C’est-à-dire : « il n’y a pas de pansement qui puisse guérir cette jambe de bois qui me fait boiter. »

Comme le jeu est involontaire, répétitif, prévisible et pourtant surprenant, nous le prenons souvent pour une simple communication ratée. Son aspect confus ambigu nous donne l’impression qu’il est inévitable et pourtant qu’il a été généré par l’autre. Plus ou moins longs, plus ou moins désagréable, le jeu nous fait mobiliser nos comportements les plus négatifs. Sous forme légère, il ne génère qu’un gaspillage de temps et d’énergie, un sentiment final d’irritation et d’impuissance. Mais il existe aussi des jeux dangereux. Les gens OK-/OK- sont souvent des joueurs acharnés. Leurs comportements sont destructeurs et autodestructeurs. Lorsque les échanges négatifs sont fréquents et intenses, lorsque les signes de reconnaissances négatifs échangées sont particulièrement virulents, qu’apparaissent les menaces, les insultes, les coups, Éric Berne parle de jeu de « bas-fonds ». Il commence par du harcèlement moral, s’intensifient dans la violence verbale et physique. L’hôpital, la morgue, le tribunal et la prison sont les ingrédients des jeux les plus destructeurs.

Cela semble empirer à l’époque présente.

Malheureusement oui, la multiplication des procès, des attentats, des violences en tout genre tend à prouver que les jeux psychologiques s’intensifient se généralisent. Je pense qu’il devient urgent de renverser la tendance. Mais le changement ne se fera que par des prises de conscience individuelle. Chacun à son niveau de devenir conscient de ses propres jeux et apprendre à combler autrement son besoin de stimulation.

Alors, revenons à nous. Que repérons-nous des jeux en cours dans notre vie quotidienne ? Nous sentons-nous plutôt OK plus et entouré de gens à qui nous pouvons faire confiance ? Sommes-nous portés à complexer ou à mépriser ? Échangeons-nous plutôt de l’attention positive ou de l’attention négative avec nos proches ? Que faisons-nous pour nous rendre remarquable aux yeux de notre entourage ?

Le Triangle de Karpmann

Les travaux d’Eric Berne sur les jeux psychologiques ont été complétés par la découverte du Triangle Dramatique par Stephan Karpmann. Les jeux décrits par Eric Berne comportaient différents rôles : le chat, la poire, le naïf… Stephan Karpmann a synthétisé tous ces personnages possibles en les simplifiant en trois rôles complémentaires qu’on trouve systématiquement dans tous les jeux : la victime, le bourreau (ou persécuteur) et le sauveur.

 

 

LA VICTIME :

 

Le rôle de victime consiste à être pur, innocent et réduit à l’impuissance. La victime est une personne fragile en apparence, plaintive voire pleurnicharde, malheureuse et passive. Pleine de bonne volonté, mais poursuivie par des catastrophes, elle est de surcroît gaffeuse et si énervante qu’on ne peut s’empêcher de la remettre à sa place. Elle cherche à vous culpabiliser d’aller bien quand elle est si mal. Elle insinue que vous avez de la chance (et pas elle), niant les moyens que vous vous donnez pour avoir ce que vous avez. Son objectif : vous inspirer de la pitié pour que vous la preniez en charge et vous rendre responsable de sa souffrance comme de son éventuel futur bonheur. Pour arriver à ses fins, elle peut aussi se faire séductrice et vous flatter : « Tu es la seule personne qui me comprenne » ou « Je ne sais pas ce que je deviendrais sans toi ! ». Si elle est adroite, elle arrivera à vous faire croire que vous avez beaucoup à gagner à vous occuper d’elle.

Notons que le terme de victime n’existe qu’au féminin. Pourtant, de nombreux hommes sont tout aussi capables que les femmes d’être passifs et gaffeurs, tout aussi doués pour se faire prendre en charge et savent aussi très bien inspirer de la pitié et de la culpabilité.

 

LE BOURREAU OU PERSECUTEUR :

Pour qu’il y ait une victime, il faut qu’il y ait un bourreau, terme qui à l’inverse, n’a pas d’équivalent féminin. Le rôle du bourreau est d’être méchant, cruel, sans cœur, et éventuellement violent verbalement ou physiquement. Bien sûr, on retrouve autant de bourreaux masculins que féminins. On utilise également le terme de « persécuteur » (ou « persécutrice », vive la mixité !). Pour distinguer les deux termes on peut dire que le bourreau utilise l’artillerie lourde : une persécution massive, assez virile et directe. Il est autoritaire, sévère, cassant et méprisant. Ses propos sont définitif et sans appel. Sa principale technique est l’intimidation. Il fait peur et on hésite à le contrarier. Le persécuteur est la version plus version légère et sournoise du bourreau, plus féminine, d’une certaine façon plus diluée dans le quotidien. Le persécuteur est tracassier, critique, dévalorisant, harceleur. Il est plus dans le registre du supplice de la goutte d’eau que dans celui du coup de matraque. Dans les deux cas, il s’agit d’une personne en overdose de frustration qui cherche à évacuer cette dernière sur… une victime innocente bien sûr. L’irascibilité, l’aigreur, le coté rabat joie ou donneur de leçons la caractérise souvent.

LE SAUVEUR OU SAUVETEUR:

 

Il est bon et généreux, altruiste et équilibré, fort et protecteur. C’est un vrai drogué de travail, il ne s’arrête jamais. Courageux, de surcroît, il est toujours prêt à défendre les opprimés et les causes perdues. Mais son côté protecteur et infantilisant sert à créer de la dépendance, car il a secrètement peur d’être abandonné. Alors il vous valorise et se pose en solution à vos problèmes. Il affirme affectueusement que sans lui, vous ne pourriez aller bien loin. Il vous rappelle au besoin que vous avez une énorme dette envers lui en raison de son indéfectible dévouement et sait se montrer très culpabilisant. Dans ce cas, son leitmotiv est : « Avec tout ce que j’ai fait pour toi! ». Pourtant, avec lui, le remède est souvent pire que le mal. Son aide inadéquate peut même générer des difficultés plus grandes encore que celles qu’il prétendait résoudre, car il trouverait normal de sortir des poissons de l’eau pour leur permettre de respirer.

 

En résumé :

  • La victime apitoie, attire, énerve, excite.
  • Le bourreau attaque, brime, donne des ordres et provoque la rancune.
  • Le sauveur étouffe, apporte son aide inefficace, crée la passivité par l’assistanat.

Vous êtes peut être déjà en train de vous demander quelle est votre place dans ce triangle, et vous êtes probablement reconnu partiellement dans les trois rôles. C’est normal, car si nous avons tous notre rôle préféré pour entrer dans le jeu, nous allons nous faire voler notre place, à un moment ou à un autre, comme au jeu des chaises musicales. A partir du moment où on se laisse embarquer dans le triangle, on va alternativement passer par les trois cases et jouer les trois rôles.

De quoi parlerons-nous lors du prochain numéro ?

De la dynamique du Triangle dans des contextes tels que la société ou la famille. Bon été à vous Christine et à tous nos lecteurs.

Bon été Guillaume

Bibliographie :

René de Lassus : L’analyse Transactionnelle. Editions Marabout

Bernard Raquin : Sortir du Triangle Dramatique : Editions Jouvence

Stephen Karpman : Le Triangle Dramatique : Intereditions

Vincent Lenhardt, Pierre Nicolas, Alain Cardon : Mieux vivre avec l’Analyse Transactionnelle. Editions Eyrolles

 

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